Ssynthesis

Un grand projet

Publié le jeudi 26 décembre 2024

Partie de la série : Fragments

Lorsqu’on entre dans le monde de la recherche académique (je ne parle que de mon expérience évidemment), on observe un phénomène assez déroutant. Les concepts que l’on a étudié jusque là sont terriblement simples comparés à ce que l’on étudie maintenant, au point de se demander presque à quoi ont servi les années d’avant. Mais les concepts qui semblent nous guetter dans les années d’après semblent vraiment compliqués. Et l’année d’après, les concepts que nous étudions auparavant semblent finalement abominablement simples, et les concepts que l’on craignait se révèlent effectivement être complexes, jusqu’à l’année d’après. Lorsqu’on commence à enfin faire de la recherche, chaque victoire (au début), chaque découverte, et chaque papier publié, provoque un mélange de joie et de doute. Une joie de voir sa création reconnue et acclamée par une communauté. Une joie d’avoir coché une case. Mais un doute terrible quand à la valeur que l’on a apporté. Après avoir longtemps longtemps étudié un problème, lorsque la réponse vient, elle est souvent évidente, et une fois qu’elle est écrite proprement, on ne peut que se morfondre de n’y avoir pas pensé plus tôt.

Ceci est un cas typique d’:heurétique, ou de dissymétrie découverte-vérification.

De ce fait, je pense que certaines des plus grandes découvertes sont faites non pas dans un éclair de génie, mais au contraire dans une exploration consciencieuse, et longue, de la confusion. C’est lorsqu’on arrive à dissiper le brouillard et à rendre limpide quelque chose qui semble compliqué que l’on a vraiment fait avancer la science.

En particulier, j’aimerais m’attaquer à un problème gigantesque, mais pour lequel cela m’étonne que personne n’ait encore trouvé (ou du moins vulgarisé) de solution : celui de la compréhension de la compréhension. La physique explique assez bien le monde. La théorie de l’information explique assez bien l’information. La psychologie et les sciences cognitives expliquent assez bien l’esprit humain. La philosophie s’essaye à expliquer des grands concepts que les autres sciences n’osent approcher, etc… Mais à ma connaissance aucune science n’explique la compréhension même que l’on a des choses. Est-ce que les mathématiques sont intrinsèques au monde ? Ou bien sont-elles simplement un modèle mental particulièrement pertinent ? Est-ce que notre découpage de la réalité en notions et en concepts est pertinent lui aussi ? Est-ce que nous ne sommes pas entravés dans notre compréhension des choses par une vision réductionniste ? Est-ce que les approches systémiques sont fondamentalement différentes ? Je me demande, et je remarque, en posant ces questions, être relativement confus, et légèrement accablé de n’avoir aucune d’idée d’où même simplement commencer. C’est là exactement la sensation que je recherche. Il faut remarquer la confusion, et lorsqu’elle est d’ordre rationnelle, la traiter comme indiqué dans les Séquences, et lorsqu’elle est plus profonde que ça, et qu’elle semble brouiller le sens même des choses, alors il faut creuser.